X / PATHOLOGIES DE LA RETINE
RETINOPATHIES VASCULAIRES
Hémorragie, exsudats, oedème, ischémie ou infarctus de la rétine dus à une maladie vasculaire générale ou oculaire.
Les rétinopathies vasculaires comprennent la rétinopathie hypertensive, la rétinopathie diabétique, l'occlusion de l'artère centrale de la rétine, et l'occlusion de la veine centrale de la rétine. Pour la rétinopathie du prématuré, v. Retinopathie de la prematurite, Ch. 260
RETINOPATHIE HYPERTENSIVE
Rétinopathie provoquée par une pression sanguine élevée.
La rétinopathie hypertensive survient dans le cadre d'une HTA essentielle chronique, d'une HTA maligne, ou d'une toxémie gravidique. Elle se développe à partir de l'artériolosclérose hypertensive, qui correspond à l'épaississement des artérioles en réponse à l'HTA chronique. Ces changements sclérotiques rendent le réflexe artériolaire à la lumière long et lent. Aux stades précoces de la rétinopathie hypertensive, le fond d'oeil montre un rétrécissement artériolaire rétinien généralisé ou localisé. Ultérieurement apparaissent des hémorragies superficielles en flammèches et de petits foyers blancs d'ischémie rétinienne (taches cotonneuses). Des exsudats jaunes solides (drusen), dus au dépôt de lipides dans les couches profondes de la rétine et provenant d'une fuite à partir des vaisseaux rétiniens, sont observés à un stade tardif. Ces exsudats peuvent former une figure à étoile sur la macula (v. aussi Ch. 199). La papille optique devient congestive et démaciée dans l'HTA sévère (oedème papillaire, v. Ch. 101).
Traitement
La rétinopathie hypertensive et l'artériosclérose hypertensive ne peuvent être contrôlées que par le tt médical de l'HTA.
RETINOPATHIE DIABETIQUE
Variété de troubles rétiniens pathologiques caractéristiques du diabète sucré.
Cette cause majeure de cécité peut être particulièrement grave chez les diabétiques ayant un diabète insulino-dépendant (DID, diabète sucré de type I) ; mais elle est également fréquente dans le diabète non insulino-dépendant (DNID, diabète sucré de type II). La gravité de la rétinopathie est fortement liée à l'ancienneté du diabète.
Symptomatologie et diagnostic
La rétinopathie non proliférative (appelée également rétinopathie postérieure) est caractérisée par une augmentation de la perméabilité capillaire, des microanévrismes, des hémorragies, des exsudats et un oedème. Les symptômes affectant la vision n'apparaissent généralement pas aux stades précoces. Cependant, des changements visuels précoces peuvent être observés chez certains patients, en particulier chez des patients souffrant de DNID. C'est pour cela que la conduite à tenir comprend un examen annuel chez les patients présentant un DNID et un examen annuel qui commence 5 ans après le diagnostic chez ceux présentant un DID. L'examen clinique des femmes diabétiques doit être effectué chaque trimestre pendant la grossesse.
Les premiers signes d'une rétinopathie diabétique sont souvent une dilatation veineuse et la présence de petits points rouges vus à l'ophtalmoscopie au pôle postérieur de la rétine. Ces points correspondent à des microanévrismes capillaires objectivés par l'angiographie à la fluorescéine. Des hémorragies rétiniennes punctiformes ou en flaques, un oedème profond et des exsudats lipidiques peuvent retentir sur la fonction maculaire. Les symptômes tardifs sont une diminution généralisée de la vision provoquée par une perfusion capillaire réduite et un oedème maculaire. L'oedème maculaire est une cause fréquente de déficit visuel chez les diabétiques et peut être détecté ou confirmé dans les meilleures conditions par l'angiographie à la fluorescéine. Des taches d'aspects cotonneux ou laineux (exsudats mous) apparaissent, ce sont des microinfarctus provoqués par une perfusion rétinienne réduite. Les vaisseaux sous-jacents sont blancs et obscurs. Les exsudats durs sont provoqués par un oedème chronique. Ils sont jaunes et généralement profonds par rapport aux vaisseaux rétiniens.
La rétinopathie proliférative est caractérisée par le développement de néovaisseaux (néovascularisation) sur la surface du vitré qui s'étendent dans le corps vitré. Dans les cas avancés, des membranes néovasculaires peuvent se former et produire un décollement de rétine. La néovascularisation peut produire des hémorragies vitréennes. Les symptômes visuels sont variables selon les événements pathologiques. Par exemple, une perte de vision soudaine et grave peut se produire en cas d'hémorragie intravitréenne. Le pronostic visuel dans la rétinopathie proliférative est plus limité si elle est associée à une ischémie rétinienne grave, une néovascularisation étendue, ou à la formation importante de tissu fibreux.
Traitement
Le contrôle du diabète et de la tension artérielle est important. Les essais de contrôle du diabète et de ses complications ont démontré que le tt intensif à l'insuline peut retarder l'apparition et ralentir la progression de la rétinopathie diabétique, de la néphropathie, et de la neuropathie chez les patients présentant un DID. Les symptômes visuels, tels qu'un flou visuel, l'apparition brutale d'un déficit visuel de 1 ou des 2 yeux, et la perception de taches noires, de toiles d'araignées ou d'éclairs lumineux justifient la consultation ophtalmologique immédiate.
La photocoagulation panrétinienne peut atténuer ou supprimer la rétinopathie proliférative et la néovascularisation irienne. La photocoagulation précoce réduit le risque de développer un glaucome néovasculaire. La vitrectomie peut être utile dans les hémorragies de l'humeur vitrée.
OCCLUSION DE L'ARTERE CENTRALE DE LA RETINE
L'occlusion de l'artère centrale de la rétine produit une cécité brutale, indolore, unilatérale.
L'occlusion peut être due à une embolie (plaques d'athérosclérose disséminées, endocardite, embolie graisseuse, myxome de l'oreillette) ou à la thrombose de l'artère centrale sclérosée. Une autre cause importante est l'artérite temporale (artérite temporale, v. Ch. 50). L'occlusion d'une branche de l'artère centrale est fréquemment d'origine embolique.
La pupille réagit faiblement à l'illumination directe, alors qu'elle se contracte brutalement quand l'autre oeil est éclairé. Dans les cas aigus, le fond d'oeil est pâle, sombre, alors que la fovéa est rouge vif (tache rouge cerise). De manière typique, les artères sont grêles et peuvent sembler non perfusées. L'occlusion embolique est parfois visible ; si elle n'est pas rapidement levée, l'infarctus de la rétine survient et provoque une cécité définitive. Si l'occlusion ne touche qu'une grosse branche, et pas le tronc de l'artère centrale, les anomalies du fond d'oeil sont limitées au territoire correspondant, et un scotome partiel permanent s'installe à moins que l'obstacle ne soit levé.
Traitement
Le tt immédiat est impératif. La diminution de la tension intra-oculaire par le massage digital intermittent du globe à travers les paupières ou la paracentèse de la chambre antérieure, peut déplacer une embolie et permettre sa migration dans une branche de division plus périphérique, réduisant ainsi la zone d'ischémie rétinienne.
OCCLUSION DE LA VEINE CENTRALE DE LA RETINE
L'occlusion de la veine centrale de la rétine survient habituellement chez des sujets âgés.
Le glaucome, le diabète sucré, l'HTA, l'hyperviscosité sanguine et l'élévation de l'Hte sont des facteurs prédisposants. L'occlusion est rare chez le sujet jeune ; elle peut être idiopathique et ressembler à une phlébite rétinienne.
Symptomatologie et diagnostic
La diminution de l'acuité visuelle est indolore et s'installe moins brutalement que dans l'occlusion artérielle. Les veines rétiniennes apparaissent distendues et tortueuses ; le fond d'oeil est congestionné et oedémateux ; et de nombreuses hémorragies rétiniennes apparaissent. Ces signes sont limités à un quadrant si l'obstruction n'intéresse qu'une seule branche de la veine. Une néovascularisation de la rétine ou de l'iris (rubéose irienne) provoquant un glaucome secondaire (néovasculaire), peut se développer dans les semaines ou les mois suivant l'occlusion. L'angiographie à la fluorescéine est essentielle pour apprécier l'état de la circulation.
Pronostic et traitement
Une perfusion rétinienne normale laisse espérer une évolution habituellement favorable ; lorsque la perfusion est très diminuée, le risque de complications est plus élevé.
Il n'y a pas de tt médical unanimement accepté. L'involution par photocoagulation d'une néovascularisation rétinienne exubérante permet parfois de réduire les hémorragies du vitré et de prévenir le glaucome secondaire néovasculaire.
DEGENERESCENCE MACULAIRE SENILE [DMS]
Atrophie et dégénérescence de la macula.
La DMS est la cause principale de déficit visuel chez le vieillard. L'affection est également répartie dans les 2 sexes, mais elle est beaucoup plus fréquente chez les blancs que chez les noirs. On ne connaît pas de facteur systémique prédisposant, mais la maladie est peutêtre héréditaire. Il semble y avoir une corrélation entre le tabagisme et la dégénérescence maculaire liée à l'âge. Deux formes différentes de DMS sont observées : l'atrophie maculaire dégénérative (la forme sèche), où l'on observe des anomalies pigmentaires de la région maculaire sans cicatrice maculaire surélevée et peu ou pas d'hémorragie ou d'exsudat au niveau de la région de la macula ; la dégénérescence maculaire disciforme (la forme humide), beaucoup plus rare, où l'on observe la formation d'un réseau sous-rétinien de néovascularisation choroïdienne souvent associée à une hémorragie intra-rétinienne, une transsudation liquidienne vers l'espace sous-rétinien, un décollement de l'épithélium pigmentaire et une hyperpigmentation. Ce complexe finit par se tasser, laissant une cicatrice surélevée visible au pôle postérieur. Les 2 formes de DMS sont souvent bilatérales et précédées par l'apparition de drusen de la région maculaire.
Symptomatologie et diagnostic
Une diminution indolore de la vision centrale, lente ou brutale, peut être observée. Le premier symptôme est parfois la distorsion de la vision d'un oeil (métamorphopsie) ; la distorsion de la vision d'un oeil (métamorphopsie) peut être facilement vérifiée par la grille d'Amsler (une grille carrée et très fine vue d'une distance de 35 cm). L'examen du fond d'oeil montre une anomalie pigmentaire ou un trouble hémorragique de la région maculaire de l'oeil concerné ; l'oeil opposé présente presque toujours des anomalies de la pigmentation et des drusen sur la macula. L'angiographie à la fluorescéine peut révéler une membrane de néovascularisation sousrétinienne.
Pronostic et traitement
Les patients atteints de DMS, bien qu'étant souvent considérés comme aveugles (acuité < 20/200), ont une bonne vision périphérique et une certaine perception des couleurs. Ils doivent être informés qu'ils ne perdront pas complètement la vue.
Si l'angiographie à la fluorescéine montre des réseaux de néovaisseaux autour de la fovea, elle sera traitée par une photocoagulation appropriée au laser. Pour les patients ayant perdu la vision centrale, des dispositifs d'assistance visuelle sont disponibles et le recours aux organismes pour malvoyants est indiqué.
DECOLLEMENT DE RETINE
Séparation du neuroépithélium de l'épithélium pigmentaire sous-jacent.
Le décollement rhegmatogène implique la présence d'une déchirure rétinienne. Elle se rencontre surtout dans la myopie, ou après chirurgie de la cataracte, ou encore après un traumatisme oculaire.
Les décollements non rhegmatogènes (décollements sans déchirure) sont consécutifs à une traction vitréorétinienne (p. ex. rétinopathie proliférative du diabète ou de la drépanocytose), ou à une transsudation liquidienne vers l'espace sous-rétinien (p. ex. uvéite grave, surtout dans le cadre de la maladie de VogtKoyanagiHarada, ou de tumeurs choroïdiennes primitives ou métastatiques).
Symptomatologie et diagnostic
Le décollement de rétine est indolore. Les symptômes prémonitoires peuvent comprendre la perception d'images sombres ou irrégulières, dues à des corps flottants au niveau du vitré, d'éclairs lumineux, ou un brouillard visuel. A mesure que le décollement progresse, le patient remarque une sensation de voile ou de rideau au niveau du champ visuel. Si la macula est atteinte, l'acuité de la vision centrale s'effondre.
L'ophtalmoscopie directe peut montrer des irrégularités rétiniennes et une surélévation bulleuse de la rétine, associée à un assombrissement des vaisseaux. L'ophtalmoscopie indirecte, dont la dépression sclérale, est nécessaire pour détecter les déchirures et les décollements périphériques.
Si une hémorragie du vitré empêche l'examen, en particulier d'un oeil myope, aphaque (après ablation du cristallin) ou ayant subi un traumatisme, un décollement de rétine doit être suspecté, et une échographie pratiquée.
Traitement
Bien que souvent localisés, les décollements de rétine dus à une déchirure rétinienne, s'ils ne sont pas rapidement traités, peuvent s'étendre et toucher la rétine toute entière. Tout patient chez qui le diagnostic de décollement de rétine est suspecté ou établi, doit être vu en urgence par un ophtalmologiste.
Le décollement rhegmatogène est traité en localisant les trous ou déchirures rétiniens et en les obstruant par laser, diathermie ou cryo-application. L'oeil peut être traité par cerclage, au cours duquel la collection liquidienne sous-rétinienne peut être drainée. Des déchirures de la rétine antérieure, sans décollement, peuvent être scellées par cryopéxie transconjonctivale ; les brèches postérieures peuvent être fermées par photocoagulation. Plus de 90 % des décollements rhegmatogènes peuvent être réappliqués chirurgicalement. Si la rupture est située dans les 2/3 supérieurs de l'oeil, les décollements simples peuvent être traités par rétinopexie pneumatique.
Les décollements non rhegmatogènes dus à une traction vitréorétinienne sont accessibles à la chirurgie intravitréenne ; les décollements transsudatifs dus à une uvéite peuvent répondre à la corticothérapie systémique. Les néoplasies primitives de la choroïde (mélanomes malins) nécessitent parfois l'énucléation, bien que la radiothérapie avec résection locale soit parfois possible ; les hémangiomes de la choroïde sont accessibles à la photocoagulation localisée. Les néoplasies choroïdiennes métastatiques (les foyers primitifs habituels étant les seins, les poumons, et le tube digestif) peuvent bien répondre à la radiothérapie.
RETINITE PIGMENTAIRE
Dégénérescence tapétorétinienne bilatérale, lentement évolutive.
Une transmission héréditaire est souvent difficile à mettre en évidence ; elle peut être également autosomique dominante, ou plus rarement, liée au chromosome X. Elle s'intègre parfois à un syndrome complexe (Bassen-Kornzweig, Laurence-Moon-Biedl).
Symptomatologie et diagnostic
Les bâtonnets de la rétine sont touchés, avec pour conséquence une baisse de la vision nocturne qui peut devenir symptomatique lors de la petite enfance. Un scotome annulaire (détecté par l'étude du champ visuel) s'élargit progressivement, si bien que la vision centrale finit par être atteinte.
Le signe ophtalmoscopique le plus évocateur est une pigmentation noire en étoile de la rétine équatoriale. Les artères de la rétine sont souvent grêles, et la papille a parfois une aspect jaune-cire. Les autres manifestations peuvent comprendre des opacités dégénératives du vitré, une cataracte et une myopie. La rétinite pigmentaire peut être associée à une surdité congénitale.
Le diagnostic est facilité par des examens spécialisés (p. ex. adaptation à l'obscurité, électrorétinogramme [ERG]). D'autres rétinopathies pouvant simuler la rétinite pigmentaire doivent être éliminées (p. ex. la syphilis, la rubéole, les effets toxiques de la chloroquine). Les membres de la famille doivent être examinés pour établir le mode de transmission.
Traitement
Aucun tt ne permet de ralentir l'évolution de la dégénérescence rétinienne. Récemment, une rétine neurale foetale a été transplantée chez des patients. Les résultats préliminaires ont montré une augmentation de l'acuité visuelle.